Vous retrouverez ici un court résumé pour chacune des nouvelles du recueil mais l’analyse approfondie pour tous les textes du recueil se trouve à la page suivante 😉
- 1. Les vrilles de la vigne
- 2. Rêverie du nouvel-an
- 3. Chanson de la danseuse
- 4. Nuit blanche
- 5. Jour gris
- 6. Le dernier feu
- 7. Amours
- 8. Un rêve
- 9. Nonoche
- 10. Toby-Chien parle
- 11. Dialogue de bêtes
- 12. Maquillages
- 13. Belles-de-jour
- 14. De quoi est-ce qu’on a l’air
- 15. La guérison
- 16. Le miroir
- 17. La dame qui chante
- 18. En baie de Somme
- 19. Partie de pêche
- 20. Music Halls

1. Les vrilles de la vigne
Colette nous débarque dans un univers poétique où la nature et l’expérience humaine s’entrelacent. Le récit débute avec un rossignol qui, autrefois, ne chantait que le jour. Une nuit, endormi sur un jeune sarment, il se retrouve piégé par les vrilles croissantes de la vigne. Après s’être libéré avec difficulté, il décide de chanter la nuit pour rester éveillé, transformant ainsi son chant en une mélodie nocturne envoûtante.
Colette établit un parallèle entre le rossignol et sa propre expérience. Elle évoque comment les vrilles d’une vigne amère l’ont liée pendant son printemps insouciant. En rompant ces liens, elle découvre sa voix, une métaphore de l’émancipation personnelle et artistique. Cette transformation souligne la manière dont les obstacles peuvent révéler des talents cachés et conduire à une expression authentique de soi.
Le texte explore également le thème du désir et de la quête d’expression personnelle. Colette exprime une envie irrésistible de partager tout ce qu’elle ressent, pense et devine. Cependant, une « sage main fraîche » sur sa bouche la ramène à une expression plus modérée, illustrant la tension entre le désir de s’exprimer librement et les contraintes sociales ou personnelles qui limitent cette expression.
2. Rêverie du nouvel-an
Colette nous invite à une promenade poétique à travers un Paris enneigé, en compagnie de ses deux chiennes : la pétillante Poucette, une bull terrier, et la réservée bergère flamande. Cette escapade nocturne, rare en raison des neiges peu fréquentes à Paris, est l’occasion pour l’auteure de retrouver une joie enfantine, courant et jouant dans les rues désertes, savourant la douceur éphémère des flocons.
De retour chez elle, installée devant un feu chaleureux, Colette observe ses compagnes à quatre pattes. La bergère flamande, mystérieuse et digne, capte particulièrement son attention, tandis que Poucette, épuisée par l’excitation, s’endort profondément. Ce moment de quiétude contraste avec l’effervescence de la promenade et incite l’auteure à une introspection sur le temps qui passe.
Les souvenirs de son enfance à la campagne ressurgissent, évoquant les traditions simples et joyeuses des fêtes de fin d’année. Elle se remémore les rituels païens mêlés aux célébrations chrétiennes, les tambours matinaux annonçant la nouvelle année, et la magie des hivers enneigés. Ces réminiscences contrastent avec sa réalité actuelle, marquée par une certaine mélancolie face au temps qui s’écoule.
Face à son reflet dans le miroir, Colette médite sur l’inéluctabilité du vieillissement. Elle exprime une résignation teintée de sérénité, exhortant à accepter cette transformation comme une partie essentielle de la vie. La nouvelle se conclut sur une note poignante, mêlant tristesse et apaisement : vieillir, c’est avancer avec grâce vers l’inévitable.


3. Chanson de la danseuse
L’auteure française explore la féminité et le désir à travers la métaphore de la danse. La narratrice, s’adressant à son amant, réfute l’idée d’être une danseuse formée, affirmant n’avoir jamais appris à danser. Pourtant, aux yeux de son partenaire, chacun de ses mouvements quotidiens – qu’il s’agisse de marcher, de puiser de l’eau ou de cueillir des fleurs – est perçu comme une danse gracieuse et naturelle.
Cette perception souligne la manière dont le regard masculin peut idéaliser et interpréter les gestes féminins comme des expressions de séduction innée. La narratrice prend conscience que, même dans l’intimité, son partenaire voit en elle une danseuse, notamment lorsqu’elle s’éloigne de lui après leurs étreintes. Il considère que sa plus belle danse est celle de son départ, où son corps, encore empreint de leur union, exprime inconsciemment une sensualité résiduelle.
Colette utilise la danse comme une métaphore de la vie elle-même, suggérant que chaque femme, qu’elle en soit consciente ou non, évolue dans une chorégraphie dictée par les attentes sociétales et les perceptions des autres. La narratrice exprime une résignation face à cette réalité, envisageant même sa propre mort comme une dernière danse, souhaitant que les dieux lui accordent une chute harmonieuse, symbolisant une acceptation gracieuse de son destin.
Ce texte poétique et introspectif met en lumière la dualité entre l’image que la société projette sur les femmes et leur propre perception d’elles-mêmes. Colette invite ainsi le lecteur à réfléchir sur la construction de l’identité féminine, souvent façonnée par le regard extérieur, et sur la quête d’une expression authentique de soi au-delà des rôles imposés.
En somme, Chanson de la danseuse est une réflexion sur la féminité, le désir et la manière dont les femmes naviguent entre leur essence propre et les projections extérieures. À travers la métaphore de la danse, Colette illustre la tension entre l’être et le paraître, offrant une perspective nuancée sur la condition féminine et la quête d’authenticité.
4. Nuit blanche
Dans ce quatrième texte du recueil Les Vrilles de la vigne, Colette nous invite à partager une nuit d’insomnie empreinte de sensualité et de complicité amoureuse. Le récit, dédié à « M… », fait référence à Mathilde de Morny, dite « Missy », amante de l’auteure. Cette nouvelle explore avec finesse les méandres de l’amour et de l’intimité féminine.
Le texte s’ouvre sur la description d’un lit conjugal, symbole central de l’union des deux femmes. Ce lit, chaste en apparence, cache les secrets de leurs étreintes nocturnes : « Ceux qui viennent nous voir le regardent tranquillement, et ne détournent pas les yeux d’un air complice, car il est marqué, au milieu, d’un seul vallon moelleux, comme le lit d’une jeune fille qui dort seule. » Cette image suggère la discrétion de leur relation et la profondeur de leur lien.
Au fil de la nuit, la narratrice, en proie à l’insomnie, revit les moments partagés lors d’une journée printanière. Les souvenirs affluent : les promenades dans les jardins, les fleurs cueillies, les gestes tendres de son amante. Chaque détail est évoqué avec une sensualité délicate, reflétant la fusion des sens et des émotions : « Je ne savais que rire et crier, en foulant la longue herbe juteuse qui tachait ma robe… Ta tranquille joie veillait sur ma folie. »
L’insomnie devient alors le miroir de l’agitation intérieure de la narratrice. Son corps est traversé de sensations contradictoires, oscillant entre le désir et la quête de repos : « Mille fois mille fourmis courent avec mon sang sous ma peau. Les muscles de mes mollets battent, mes oreilles tressaillent. » Cette tension illustre la complexité des sentiments amoureux et l’intensité de la passion partagée.
La complicité entre les deux femmes est palpable tout au long du récit. Malgré le silence de la nuit, leurs pensées s’entrelacent, témoignant d’une profonde connexion émotionnelle : « Tu ne dors pas. Tu épies ma fièvre. Tu m’abrites contre les mauvais songes ; tu penses à moi comme je pense à toi, et nous feignons, par une étrange pudeur sentimentale, un paisible sommeil. » Cette communion silencieuse renforce la beauté de leur relation.
En conclusion, il s’agit d’une ode à l’amour et à l’intimité féminine. À travers une prose poétique et sensuelle, Colette dépeint avec justesse les tourments et les délices d’une nuit d’insomnie partagée avec l’être aimé. Ce texte illustre la capacité de l’auteure à saisir les nuances de l’âme humaine et à célébrer la beauté des relations sincères et profondes.


5. Jour gris
Dans ce cinquième texte, Colette nous plonge dans une atmosphère mélancolique, où la narratrice, confrontée à un paysage maritime hostile, cherche refuge dans les souvenirs de son enfance. Le texte s’ouvre sur une scène où la narratrice, malade et irritée, rejette la mer agitée et le vent impétueux qui l’entourent. Elle exprime son malaise en des termes forts, comparant son état à celui de la mer déchaînée : « Je suis malade et méchante, comme la mer. »
Cherchant à échapper à cette réalité oppressante, la narratrice se tourne vers son compagnon, qu’elle invite à partager les souvenirs de son pays natal. Elle évoque un jardin sombre, « noir de verdure et sans fleurs », et une montagne lointaine teintée d’« azur mauve et poussiéreux ». Cette description crée une ambiance à la fois mystérieuse et envoûtante, où le temps semble suspendu.
La narratrice poursuit en décrivant une vallée étroite, comparée à un berceau, où flotte un brouillard vivant, capable de prendre diverses formes : nuage, femme endormie, serpent langoureux, cheval à cou de chimère. Cette métamorphose constante du paysage confère une dimension fantastique au souvenir, symbolisant peut-être les états d’âme changeants de la narratrice.
Cependant, cette immersion dans le passé n’est pas sans danger. La narratrice avertit que rester trop longtemps penché sur cette vallée peut provoquer des frissons et des songes fous, suggérant que la nostalgie excessive peut mener à la perte de soi. Cette tension entre l’attrait du passé et les risques qu’il comporte est au cœur du texte.
Finalement, la narratrice réalise l’effet de son récit sur son compagnon, le voyant pâle et les yeux grands. Elle prend conscience de la distance créée par ses souvenirs et décide de revenir à la réalité présente. Elle rejette alors la nostalgie pour s’ouvrir à nouveau au monde extérieur, invitant son compagnon à ouvrir la fenêtre et la porte pour courir vers la fin dorée de ce jour gris.
Ainsi, Jour gris illustre la lutte intérieure entre le désir de se réfugier dans un passé idéalisé et la nécessité de vivre pleinement le présent, malgré ses imperfections. Colette, à travers une prose poétique riche en images sensorielles, nous invite à réfléchir sur la complexité des émotions humaines face au temps qui passe.
6. Le dernier feu
Colette célèbre avec émotion et délicatesse l’arrivée du printemps en évoquant symboliquement le dernier feu allumé dans l’âtre à la fin de l’hiver. Ce feu, chaleureux et rassurant, est concurrencé par le soleil printanier, désormais maître de la maison, qui transforme la chambre en y faisant entrer lumière et douceur.
Avec tendresse, Colette s’adresse à un interlocuteur invisible, probablement son compagnon, l’invitant à observer attentivement les transformations du jardin. Elle remarque avec nostalgie que les lilas ont grandi, que les violettes semblent avoir changé de couleur, passant d’un mauve azuré à un bleu plus profond, révélant ainsi le caractère insaisissable des souvenirs d’une année à l’autre.
Ces fleurs, chargées d’émotions, éveillent en elle le souvenir poignant des printemps de son enfance, où les violettes cueillies dans les bois représentaient une joie profonde mais mystérieuse. À travers ces souvenirs, Colette revit avec une émotion douce-amère la petite fille qu’elle était, échangeant à l’école ses jouets contre de modestes bouquets de violettes sauvages rapportés par de jeunes bergères.
Tandis qu’elle contemple ces souvenirs, son compagnon suit distraitement le vol hésitant d’une abeille égarée, illustration de l’arrivée timide du printemps. Colette l’invite alors à rêver d’un horizon plus vaste que leur petit jardin clos, évoquant avec une intensité poétique des paysages éloignés où ciel et terre se rencontrent. Pourtant, elle accepte également avec une tendresse résignée les limites réconfortantes de leur quotidien, incarnées par la giroflée précoce cueillie avant même l’éclosion du muguet et des tulipes.
Le soir venu, un vent glacé et menaçant pousse le couple à retourner se réchauffer auprès du dernier feu, devenu symbole de refuge, d’intimité, et d’amour partagé face aux incertitudes extérieures. Ce feu est décrit comme vivant, presque animal, et offre aux personnages un moment de douceur sensuelle et paisible.
Dans cette scène finale, Colette célèbre la beauté éphémère et précieuse du foyer, associée à la chaleur humaine et à l’amour discret mais profond. Le « dernier feu » incarne ainsi un moment d’apaisement, une pause réconfortante où se mêlent harmonieusement nostalgie, sensualité, et sérénité face à l’inévitable passage du temps.


7. Amours
Colette s’attarde sur les relations complexes entre humains et animaux, en mettant en lumière les comportements instinctifs et les émotions partagées. Le récit s’ouvre sur une confrontation entre un rouge-gorge audacieux et une chatte, où l’oiseau défend ardemment son nid, illustrant la bravoure face au danger. La narratrice, observatrice attentive, reconnaît la nature sacrée des rouges-gorges, et la chatte, consciente des codes de la nature, cède finalement la place à l’oiseau.
Colette évoque ensuite sa relation profonde avec les chats, qu’ils soient errants ou domestiques, soulignant la richesse de cette compagnie et la fascination qu’ils exercent sur elle. Elle mentionne une chatte errante qui l’a reconnue parmi la foule et l’a suivie jusqu’à sa maison, illustrant une connexion instinctive entre l’humain et l’animal. Cette relation contraste avec celle qu’elle entretient avec les chiens, qu’elle décrit comme chaleureux mais parfois distants lors de leurs périodes d’accouplement, révélant une facette plus égoïste de leur nature.
La chatte de la narratrice incarne une dualité fascinante. À la campagne, elle retrouve sa coquetterie, devenant légère et infidèle, s’abandonnant à plusieurs mâles sans scrupule. Cependant, son intelligence la rend parfois distante, refusant les avances de certains prétendants, démontrant une maîtrise de ses désirs. Cette attitude reflète une indépendance et une liberté que la narratrice admire, voyant en sa chatte une muse silencieuse qui l’accompagne dans ses moments d’écriture.
Amours une célébration des liens subtils entre l’humain et l’animal, mettant en lumière la beauté de la nature et la richesse des relations interespèces. Colette, à travers sa prose poétique, nous invite à contempler la complexité des émotions et des instincts qui animent tous les êtres vivants.
8. Un rêve
Dans cette huitième nouvelle du recueil, Colette nous plonge dans une atmosphère onirique où les frontières entre le réel et le subconscient s’estompent. Le récit, présenté sous forme de dialogue théâtral, débute par des visions de formes inachevées flottant dans un décor sombre et énigmatique. Soudain, un aboiement triste se fait entendre, interrompant le silence. La narratrice engage alors une conversation avec une chienne mystérieuse qui affirme être « la chienne », celle qui a mérité de revenir d’entre les morts.
Tentant de percer l’identité de cette apparition, la narratrice évoque tour à tour plusieurs chiennes de son passé. Elle pense d’abord à Nell, une chienne anxieuse qui redoutait les séparations, puis à Lola, fidèle compagne de voyage, habituée aux déplacements en train et aux séjours à l’hôtel. Cependant, chaque tentative de reconnaissance est doucement mais fermement rejetée par la chienne, qui demeure insaisissable et refuse de se laisser identifier précisément.
La chienne se décrit comme une ligne de phosphore, une plainte persistante, incarnant un souvenir à la fois précis et fuyant. À travers ce dialogue poignant, Colette explore des thèmes tels que la culpabilité, l’amour inconditionnel et l’oubli inévitable. Le rêve se dissipe brusquement au cri de la narratrice, emportant avec lui l’essence de cette chienne méritante, dont le nom demeure à jamais hors d’atteinte. Cette nouvelle est une méditation puissante sur les liens entre humains et animaux, et sur le poids des souvenirs évanescents.


9. Nonoche
Colette dresse un portrait saisissant de sa chatte tricolore, mêlant observations minutieuses et introspection poétique. Le récit s’ouvre sur une fin de journée estivale, où le jardin se remet lentement d’une longue journée de chaleur. Nonoche, endormie dans sa corbeille, est éveillée par l’ombre des pigeons qui tournoient sur le mur tiède de la maison.
Colette décrit Nonoche avec une précision affectueuse, la comparant à « une jeune fille très jolie ». Ses taches de « chatte portugaise » semblent plus en désordre que jamais, ajoutant à son charme unique. Malgré ses nombreuses maternités, Nonoche conserve une allure enfantine, sa beauté solide restant longtemps jeune. Ses pattes minces, armées de griffes en cimeterre, savent fondre confiantes dans la main amie.
Le récit explore la complexité de la personnalité de Nonoche : futile, rêveuse, passionnée, gourmande, caressante, autoritaire. Cette hyperesthésie nerveuse la rend parfois sujette à de petites crises hystériques lors de jeux, mais une caresse bien placée suffit à l’apaiser, la plongeant dans un ronronnement cristallin.
Alors que la nuit tombe, une mélancolie la gagne, amplifiée par l’appel envoûtant d’un matou mystérieux. Cette voix rauque, venue du bois, réveille en elle un désir sauvage et irrésistible, lui promettant un amour tourmenté et fugace. Malgré sa tentative de rester impassible, Nonoche cède à cet appel primitif et se dirige vers l’inconnu, abandonnant son fils déconcerté. Ce dernier, dans une tentative innocente de jouer, est brutalement rejeté par sa mère, marquant ainsi la fin de leur lien protecteur.
À travers le portrait de Nonoche, Colette célèbre l’instinct maternel tout en explorant la dualité entre l’amour et la liberté, le domestique et le sauvage. Cette nouvelle mêle poésie et émotion, nous invitant à observer avec empathie la beauté complexe du monde animal et, par écho, de la condition humaine.
10. Toby-Chien parle
Dans ce texte, Colette offre une scène domestique où les animaux, Kiki-la-Doucette, un chat des Chartreux, et Toby-Chien, un bull-terrier, dialoguent sur les tourments de leur maîtresse. Le récit commence avec Toby-Chien entrant, perturbé, tandis que Kiki-la-Doucette, feignant l’indifférence, l’interroge sur la cause de son agitation.
Toby-Chien raconte alors une scène où leur maîtresse, en proie à une crise émotionnelle, exprime son désir de liberté et d’émancipation. Elle aspire à se libérer des conventions sociales, souhaitant danser nue, écrire des œuvres sincères et s’entourer de personnes authentiques. Elle exprime également sa frustration envers les femmes qui gravitent autour de son compagnon, les qualifiant de « tortues », et déplore leur influence néfaste.
Ce monologue révèle les tensions internes de la maîtresse, partagée entre son rôle social et ses aspirations personnelles. Les animaux, témoins silencieux de ses états d’âme, offrent une perspective unique sur sa quête d’identité et de liberté. Le dialogue entre Toby-Chien et Kiki-la-Doucette sert de miroir aux dilemmes humains, reflétant la complexité des émotions et des relations.
Colette utilise ici la personnification des animaux pour explorer des thèmes profonds tels que l’émancipation féminine, la recherche de soi et la critique des normes sociales. Ce procédé littéraire permet d’aborder des sujets sensibles avec une certaine légèreté, tout en offrant une critique subtile des attentes sociétales.
En somme, Toby-Chien parle est une réflexion sur la liberté individuelle et les contraintes imposées par la société. À travers le regard des animaux, Colette invite le lecteur à s’interroger sur les sacrifices nécessaires pour atteindre l’authenticité et la véritable expression de soi.


11. Dialogue de bêtes
Dans cette nouvelle, on découvre les échanges entre Toby-Chien, le bull mélancolique, et Kiki-la-Doucette, le chat sage et ironique. Allongés près de leur maîtresse endormie, les deux animaux discutent de leur vie à la campagne. Toby exprime son ennui et sa nostalgie pour la vie parisienne, notamment ses moments passés aux Folies-Élyséennes aux côtés de leur maîtresse, une artiste de music-hall. Il se remémore avec émotion l’effervescence des coulisses, les danseuses en costumes scintillants et l’ambiance électrique des représentations.
Kiki-la-Doucette, de son côté, observe avec détachement les élans dramatiques de Toby. Il souligne la connexion profonde de leur maîtresse avec la nature environnante, percevant dans sa tranquillité une sérénité que Toby ne semble pas comprendre. Le chat incarne une sagesse pragmatique, contrastant avec les aspirations agitées du chien.
À travers ces dialogues anthropomorphiques, Colette explore des thèmes universels tels que le désir d’agitation urbaine face à la quiétude rurale, la nostalgie du passé et la quête de sens. Les réflexions de Toby et Kiki offrent une perspective unique sur la condition humaine, mettant en lumière les contrastes entre action et contemplation, mouvement et immobilité.
Ce récit illustre également l’affection profonde de Colette pour les animaux, leur prêtant des voix et des personnalités distinctes pour mieux refléter les nuances de l’âme humaine. « Dialogues de bêtes » est une invitation à la réflexion sur nos propres aspirations et sur la manière dont nous percevons le monde qui nous entoure, à travers le prisme de ces deux compagnons à quatre pattes.
12. Maquillages
Dans ce douzième texte du recueil, Colette explore avec finesse et profondeur la relation des femmes au maquillage, révélant ainsi des aspects intimes de leur identité et de leur résistance face aux normes sociales. Le récit s’ouvre sur une scène où la narratrice, incarnant Colette elle-même, sermonne sa fille sur l’utilisation du maquillage, qualifiant ces artifices de « masque de carnaval » qui vieillissent prématurément la jeunesse. Cette confrontation met en lumière le fossé générationnel et les perceptions divergentes de la beauté et de l’authenticité.
Colette évoque ensuite sa propre expérience en tant qu’esthéticienne, ayant ouvert un institut de beauté à Paris. Elle y observe la détermination des femmes à utiliser le maquillage comme un outil de résistance contre les épreuves de la vie. Elle admire leur capacité à dissimuler les signes de fatigue et de souffrance sous des couches de fard, transformant ainsi le maquillage en une armure quotidienne. Cette observation souligne la force intérieure des femmes qui, malgré les défis, maintiennent une apparence soignée et confiante.
Le texte aborde également la dimension artistique du maquillage. Colette compare la palette de couleurs modernes à une source d’inspiration pour les peintres, reflétant la richesse et la diversité des produits cosmétiques de l’époque. Elle souligne que l’art de sublimer les visages et l’industrie des cosmétiques génèrent des revenus presque équivalents à ceux du cinéma, illustrant ainsi l’importance culturelle et économique du maquillage.
En conclusion, Maquillages est une réflexion profonde sur la manière dont les femmes utilisent le maquillage non seulement pour embellir leur apparence, mais aussi pour affirmer leur identité, leur résilience et leur créativité face aux attentes sociales. Colette célèbre cette lutte quotidienne pour maintenir une image forte et indépendante, révélant ainsi une admiration sincère pour ces « lutteuses » qui restent jeunes d’esprit en défiant les conventions.


13. Belles-de-jour
Colette dépeint avec finesse la complexité des relations humaines et la dualité entre l’apparence et l’authenticité. La narratrice, Colette elle-même, attend son amie Valentine pour le thé. Valentine, habituellement ponctuelle et gourmande, arrive en retard et refuse les douceurs offertes, signalant un trouble inhabituel. Sous son maquillage soigné, des traces de larmes trahissent une détresse intérieure.
Valentine confie à Colette que son amant, un peintre talentueux, lui a reproché la différence entre son apparence publique, sophistiquée et artificielle, et son visage naturel, démaquillé. Il exprime sa frustration face à cette dualité, se sentant trompé par cette transformation nocturne qui contraste avec l’image idéalisée qu’il chérit. Cette confrontation met en lumière la superficialité des relations fondées sur l’apparence et questionne la place de l’identité véritable dans l’amour.
Colette explore ici les thèmes de l’apparence et de l’authenticité. Valentine incarne la femme moderne, prisonnière des artifices imposés par la société pour correspondre aux attentes masculines. Son chagrin révèle la fragilité des relations superficielles et la quête d’une authenticité souvent sacrifiée sur l’autel des conventions sociales. La narratrice observe avec une certaine distance critique les efforts de son amie pour maintenir une image parfaite, soulignant ainsi la pression sociale exercée sur les femmes pour se conformer à des standards de beauté souvent inaccessibles.
Cette nouvelle offre une réflexion profonde sur la dualité entre l’être et le paraître, mettant en exergue la fragilité des relations superficielles et la quête d’une authenticité souvent sacrifiée sur l’autel des conventions sociales. Colette, à travers ce récit, invite le lecteur à s’interroger sur la sincérité des relations basées sur des apparences trompeuses et sur la possibilité d’une connexion véritable lorsque les masques tombent.
14. De quoi est-ce qu’on a l’air
Dans la nouvelle De quoi est-ce qu’on a l’air , Colette explore avec finesse les tensions entre apparence sociale et authenticité personnelle. La narratrice, incarnée par Colette elle-même, s’apprête à sacrifier son dimanche de repos pour recevoir son amie Valentine, figure emblématique de la mondanité parisienne. Valentine, toujours impeccablement vêtue selon les diktats de la mode, arrive chez la narratrice, grelottante dans son élégant mais inadapté costume tailleur face au froid glacial.
Le récit met en lumière le contraste entre les deux femmes. La narratrice, adepte d’une vie simple et éloignée des conventions sociales, observe avec une pointe d’ironie les efforts incessants de Valentine pour maintenir une image parfaite. Cette dernière est constamment préoccupée par le regard des autres, répétant la question « De quoi est-ce qu’on a l’air ? » comme un leitmotiv qui guide ses choix vestimentaires et comportementaux.
Au fil de leur conversation, Valentine exprime sa fatigue face aux exigences de la vie mondaine, tout en se montrant incapable de s’en affranchir, de peur de compromettre son statut social. Elle envie secrètement la liberté de la narratrice, qui, en marge des attentes sociétales, peut se permettre de vivre selon ses propres désirs.
La nouvelle illustre la tyrannie des apparences et des conventions sociales, qui poussent les individus à se conformer à des standards souvent contraignants. Valentine, malgré son désir de repos, ne peut s’affranchir de ces obligations, de peur de « ce que l’on pourrait penser ». Ce souci constant de l’image renvoie à une fragilité intérieure que la narratrice observe avec une compassion teintée d’ironie.
Lorsque Valentine s’endort involontairement, épuisée, la narratrice veille sur elle avec une bienveillance mêlée de pitié. Ce moment suspendu souligne la solitude et la lassitude d’une vie mondaine exigeante, contrastant avec la simplicité et l’authenticité de la narratrice.
À travers ce récit, Colette offre une réflexion subtile sur la tension entre apparence et essence, mettant en lumière les sacrifices personnels imposés par les conventions sociales et l’importance de rester fidèle à soi-même.


15. La guérison
Dans ce quinzième texte du recueil Les Vrilles de la vigne, Colette explore avec finesse les méandres de la souffrance amoureuse et du processus de guérison qui s’ensuit. Le récit s’ouvre sur une scène paisible où la narratrice partage des moments complices avec sa chatte grise, évoquant une routine nocturne instaurée par ses activités théâtrales. Cette tranquillité est perturbée par l’arrivée de son amie Valentine, visiblement bouleversée par la récente rupture avec son amant.
Valentine, habituellement maîtresse d’elle-même, se dévoile ici vulnérable, cherchant auprès de la narratrice des conseils pour surmonter sa douleur. Colette dépeint avec empathie les différentes phases du chagrin d’amour : l’intensité de la souffrance initiale, les moments d’accalmie trompeurs suivis de rechutes abruptes, et enfin, l’émergence progressive d’une guérison teintée de mélancolie. La narratrice compare ce processus à une métamorphose lente, où la douleur se mue en une nouvelle forme de sensibilité, prête à accueillir un autre amour.
Ce texte met en lumière la complexité des émotions humaines face à la perte et à la résilience nécessaire pour se reconstruire. Colette, à travers une prose poétique et introspective, offre une réflexion universelle sur la capacité à renaître après l’épreuve, tout en reconnaissant le désir inné de l’être humain de rechercher à nouveau l’amour, malgré les cicatrices du passé.
Ainsi, La Guérison s’inscrit comme une méditation délicate sur la douleur et la renaissance, illustrant la profondeur de l’analyse psychologique de Colette et sa capacité à capter les nuances de l’âme humaine.
16. Le miroir
Colette engage un dialogue introspectif avec Claudine, son alter ego littéraire. Cette rencontre imaginaire se déroule dans une chambre sombre, créant une atmosphère propice à la réflexion sur leur identité commune et distincte.
Claudine, personnage central des premiers romans de Colette, est souvent perçue comme le reflet de l’auteure elle-même. Cependant, dans ce texte, Colette cherche à se démarquer de cette image fusionnelle. Elle exprime le désir de se libérer de l’association constante avec Claudine, affirmant : « Vous êtes Claudine, et je suis Colette. » Cette déclaration marque une volonté de reconquérir sa propre identité, distincte de celle de son personnage.
Le miroir, symbole central du texte, représente cette dualité entre l’auteure et son personnage. Il reflète non seulement leur ressemblance physique, mais aussi les confusions et projections du public et des critiques qui peinent à les distinguer. Cette thématique du miroir est récurrente dans la littérature du XXe siècle, souvent utilisée pour explorer les questions d’identité et de reflet de soi.
Colette évoque également la manière dont Claudine a influencé une génération de femmes, suscitant des comportements et des modes qui lui sont associés. Elle reconnaît que le succès de Claudine a engendré une multitude d’imitations, mais souligne que cette popularité a également conduit à une perte de son identité propre. Cette réflexion sur l’influence de son œuvre sur la société et sur elle-même témoigne de la complexité de la relation entre l’auteur et son personnage.
En somme, Le Miroir est une introspection profonde où Colette confronte son double littéraire pour affirmer sa propre identité. À travers ce dialogue, elle explore les notions de reflet, d’influence et de distinction entre la créatrice et sa création, offrant une réflexion riche sur la construction de soi et la perception publique.


17. La dame qui chante
Colette nous présente une scène de salon où une chanteuse s’apprête à se produire. Le narrateur, initialement sceptique et moqueur face à l’apparence de la dame, est rapidement subjugué par la puissance et la beauté de sa voix. Cette transformation de perception met en lumière le pouvoir de l’art à transcender les apparences et à éveiller des émotions profondes chez l’auditeur.
La narration débute par une description acerbe de la chanteuse. Le narrateur, assis inconfortablement, observe avec une certaine animosité la dame se frayer un chemin vers le piano. Il la juge sévèrement, souhaitant même qu’un incident l’empêche de chanter. Son apparence est dépeinte de manière peu flatteuse : une robe de satin blanc métallique, des cheveux blond artificiel, des traits agressifs. Cette description souligne les préjugés du narrateur et son aversion initiale.
Cependant, dès que la chanteuse entame son chant, une métamorphose s’opère. La première note, aiguë et vibrante, perce l’esprit du narrateur, provoquant en lui une réaction physique intense. Il est surpris par la qualité du mezzo velouté de la chanteuse, une voix pleine et nuancée. La dame, auparavant perçue comme insignifiante, semble grandir et s’élever au-dessus de l’assistance, transcendée par son art. Ses yeux, autrefois durs, s’assombrissent d’une passion nouvelle, et sa chevelure, qu’elle soit teinte ou non, la coiffe d’une flamme droite. Sa grande bouche généreuse s’ouvre, laissant s’échapper des notes comparées à des bulles d’or et des roses pures. Les trilles brillent comme un ruisseau frémissant, et les vocalises caressent comme une main fraîche. Le narrateur, fasciné, contemple cette bouche, source de sons envoûtants, et ressent un désir brûlant et incontrôlable. Il est ému jusqu’aux larmes, submergé par une passion soudaine pour cette femme que sa voix a transfigurée.
Après la performance, la chanteuse retrouve son apparence ordinaire, se mêlant aux invités avec une simplicité déconcertante. Le narrateur, encore sous le charme, tente de l’approcher, mais elle le repousse poliment, préférant un verre de bordeaux au champagne qu’il lui propose. Elle mentionne devoir chanter à nouveau « La vie et l’amour d’une femme », une perspective qui ravive l’espoir du narrateur de la revoir transformée par son art.
Cette nouvelle illustre la capacité de l’art à transcender les perceptions superficielles et à révéler la beauté intérieure. Colette démontre comment une performance artistique peut modifier notre vision de l’artiste, en dévoilant une profondeur insoupçonnée. Le narrateur passe d’une attitude cynique à une admiration fervente, illustrant le pouvoir transformateur de la musique et de la passion.
18. En baie de Somme
Colette nous invite à une immersion sensorielle en baie de Somme à travers quatre textes interconnectés : « En baie de Somme », « Bain de soleil », « À marée basse » et « Forêt de Crécy ». Ces récits, inspirés de ses séjours au Crotoy à partir de 1906, offrent une exploration poétique de la nature et des interactions humaines.
Dans « En baie de Somme », Colette dépeint un paysage côtier où les traditions locales surprennent : on y pêche en voiture et chasse en bateau. Elle observe avec humour une mère absorbée par sa lecture, négligeant ses enfants, jusqu’à ce que l’un d’eux annonce la disparition de sa sœur, provoquant une réaction vive. Cette scène met en lumière le contraste entre l’insouciance enfantine et les préoccupations adultes. Colette s’attarde également sur la faune locale, décrivant avec précision les oiseaux de marais et leurs comportements, révélant son admiration pour la nature.
« Bain de soleil » nous transporte sur une plage écrasée de chaleur, où la narratrice et sa chienne Poucette se livrent à une sieste sous un soleil ardent. La description sensorielle du sable brûlant et de l’atmosphère étouffante plonge le lecteur dans une torpeur estivale. Colette exprime le plaisir simple de s’abandonner à la chaleur, en symbiose avec la nature environnante.
Dans « À marée basse », l’auteure observe une multitude d’enfants jouant sur la plage, reflétant la diversité des classes sociales et des morphologies. Elle s’attarde sur un frère et une sœur, presque jumeaux, et note avec finesse les premières manifestations de la féminité chez la fillette. Cette observation souligne la sensibilité de Colette aux nuances du développement humain et aux interactions sociales.
Enfin, « Forêt de Crécy » nous emmène dans un sous-bois ombragé, où la narratrice retrouve des sensations d’enfance. Les descriptions olfactives des fraises sauvages, des champignons et du chèvrefeuille créent une atmosphère immersive. Colette personnifie la forêt, la rendant presque oppressante par son immensité et son silence, évoquant une nature à la fois fascinante et intimidante.
Ces quatre textes illustrent la capacité de Colette à capturer l’essence des lieux et des moments, mêlant observations précises et réflexions personnelles. Son écriture sensorielle et poétique offre au lecteur une immersion profonde dans la baie de Somme, révélant la beauté des paysages et la richesse des interactions humaines.


19. Partie de pêche
Dans ce dix-neuvième texte du recueil Les Vrilles de la vigne, Colette nous invite à une escapade en Baie de Somme aux côtés de ses amis. Le récit débute par l’annonce énergique de Marthe, figure centrale au caractère affirmé, qui organise une sortie de pêche. Dès les premières lignes, Colette dépeint Marthe comme une personne autoritaire et dynamique, imposant ses décisions avec une fermeté teintée d’ironie.
Le lendemain matin, le groupe se met en route à bord d’une automobile, traversant les paysages pittoresques de la région. Colette décrit avec précision les dunes, la mer lointaine et la végétation locale, mêlant poésie et réalisme. L’arrivée sur le lieu de pêche est marquée par une ambiance presque rituelle, où les pêcheurs locaux, comparés à une « tribu papoue conjurant l’Esprit des Eaux amères », s’activent avec des perches pour rabattre le poisson dans les filets. Cette description souligne le caractère théâtral et exotique de la scène, renforçant l’impression d’un dépaysement total.
Colette participe à la pêche avec une ardeur mêlée d’appréhension, ressentant la présence des poissons glissants entre ses jambes. Elle exprime sa jalousie envers Marthe, plus habile, et son désir de réussir sa propre prise. Cette compétition amicale est décrite avec humour et autodérision, illustrant les travers humains face aux défis de la nature.
Après une matinée fructueuse, le groupe se retire pour déjeuner sous une tente. Cependant, l’excès de poisson commence à peser sur l’ambiance. Le retour à la villa est empreint d’une lassitude générale, exacerbée par l’odeur persistante du poisson qui imprègne tout, de l’automobile aux vêtements. Marthe, initialement enthousiaste, est désormais écœurée et ordonne de se débarrasser de toute la pêche, ne souhaitant plus que des repas simples comme des œufs à la coque et du poulet rôti.
Ce récit met en lumière la confrontation entre les aspirations humaines et la réalité souvent décevante de la nature. Colette utilise l’humour et l’ironie pour dépeindre les personnages, y compris elle-même, ridiculisés dans leur tentative de dompter la nature. Les descriptions poétiques de la baie de Somme contrastent avec les mésaventures des protagonistes, accentuant la supériorité du monde naturel sur les ambitions humaines. Ainsi, « Partie de pêche » offre une réflexion sur la condition humaine, oscillant entre exaltation et désillusion, tout en célébrant la beauté indomptable de la nature.
20. Music Halls
Dernier texte du recueil Les Vrilles de la vigne, Colette offre une immersion réaliste et détaillée dans les coulisses du monde du spectacle parisien du début du XXᵉ siècle. Elle décrit avec minutie les répétitions chaotiques d’une pantomime, où les artistes, les techniciens et les directeurs se côtoient dans une atmosphère chargée d’anxiété et d’excitation.
Le récit s’ouvre sur une scène de répétition en costume, où rien ne semble fonctionner comme prévu. Les décors sont inachevés, les éclairages mal réglés, et les accessoires défaillants. Le mime W…, épuisé et malade, tente de contenir une toux rauque, tandis que le jeune amoureux, mal maquillé, subit les remontrances du mime. Le patron, nerveux, s’inquiète de l’absence de Mme Loquette, la principale interprète, dont le costume à transformation n’est pas prêt, ce qui pourrait compromettre la représentation prévue le soir même.
L’arrivée de Mme Loquette, affamée et fatiguée après des heures passées chez le costumier, ne dissipe pas les tensions. Son costume, d’inspiration incertaine, déçoit le patron et le commanditaire, qui le jugent trop simple et sombre. Le compositeur, quant à lui, aurait préféré des couleurs vives et des ornements plus extravagants. Malgré ces critiques, le mime W… trouve que le costume met en valeur sa propre tenue de contrebandier. Mme Loquette, indifférente aux commentaires, ne pense qu’à apaiser sa faim avec un sandwich au jambon.
La répétition se poursuit avec une scène où le mime W… doit arracher la robe de Mme Loquette, révélant une tenue plus légère en dessous. Cependant, le patron estime que l’effet n’est pas assez saisissant et suggère d’augmenter le degré de nudité pour accroître l’impact visuel, illustrant ainsi les exigences parfois excessives du milieu du spectacle.
Colette dépeint également l’ambiance du promenoir, où se côtoient des danseuses anglaises exécutant leurs chorégraphies avec une précision mécanique, des figurantes discutant de leurs conditions de travail précaires, et des artistes plus en vue affichant une élégance ostentatoire. Elle souligne les contrastes entre les aspirations personnelles et les réalités du métier, mettant en lumière les sacrifices consentis par ces femmes pour survivre dans un environnement souvent impitoyable.
En somme, ce dernier texte est un témoignage poignant du quotidien des artistes de l’époque, révélant les coulisses d’un monde où le glamour de la scène contraste avec la dure réalité des répétitions et des conditions de travail. À travers une écriture vivante et précise, Colette nous invite à découvrir l’envers du décor, offrant une perspective unique sur la vie des femmes dans le milieu du spectacle au début du XXᵉ siècle.


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