📚 TABLE DES MATIÈRES

  1. La lettre
  2. Résumé et enjeux
  3. Thématiques et symboles
  4. Analyse linéaire de la lettre
  5. Résonances avec le reste du roman
  6. Conclusion

La lettre

C’est ici, mon cher Aza, que je te reverrai ; mon bonheur s’accroît chaque jour par ses propres circonstances. Je sors de l’entrevue que Déterville m’avoit assignée ; quelque plaisir que je me sois fait de surmonter les difficultés du voyage, de te prévenir, de courir au-devant de tes pas, je le sacrifie sans regret au bonheur de te voir plutôt.

Déterville m’a prouvé avec tant d’évidence que tu peux être ici en moins de tems qu’il ne m’en faudroit pour aller en Espagne, que quoiqu’il m’ait généreusement laissé le choix, je n’ai pas balancé à t’attendre, le tems est trop cher pour le prodiguer sans nécessité.

Peut-être avant de me déterminer, aurois-je examiné cet avantage avec plus de soin, si je n’eusse tiré des éclaircissemens sur mon voyage qui m’ont décidée en secret, sur le parti que je prends ; & ce secret je ne puis le confier qu’à toi.

Je me suis souvenue que pendant la longue route qui m’a conduite à Paris, Déterville donnoit des piéces d’argent & quelquefois d’or dans tous les endroits où nous nous arrêtions. J’ai voulu sçavoir si c’étoit par obligation, ou par simple libéralité. J’ai appris qu’en France, non-seulement on fait payer la nourriture aux voyageurs, mais même le repos.

Hélas ! je n’ai pas la moindre partie de ce qui seroit nécessaire pour contenter l’intérêt de ce peuple avide ; il faudroit le recevoir des mains de Déterville. Quelle honte ! tu sçais tout ce que je lui dois. Je l’acceptois avec une répugnance qui ne peut être vaincue que par la nécessité ; mais pourrois-je me résoudre à contracter volontairement un genre d’obligation, dont la honte va presque jusqu’à l’ignominie ! Je n’ai pu m’y resoudre, mon cher Aza, cette raison seule m’auroit déterminée à demeurer ici ; le plaisir de te voir plus promptement n’a fait que confirmer ma résolution.

Déterville a écrit devant moi au Ministre d’Espagne. Il le presse de te faire partir, il lui indique les moyens de te faire conduire ici avec une générosité qui me pénétre de reconnoissance & d’admiration.

Quels doux momens j’ai passé, pendant que Déterville écrivoit ! Quel plaisir d’être occupée des arrangemens de ton voyage, de voir les aprêts de mon bonheur, de n’en plus douter !

Si d’abord il m’en a coûté pour renoncer au dessein que j’avois de te prévenir, je l’avoue, mon cher Aza, j’y trouve à présent mille sources de plaisirs, que je n’y avois pas apperçues.

Plusieurs circonstances, qui ne me paroissoient d’aucune valeur pour avancer ou retarder mon départ, me deviennent intéressantes & agréables. Je suivois aveuglément le penchant de mon cœur, j’oubliois que j’allois te chercher au milieu de ces barbares Espagnols dont la seule idée me saisit d’horreur ; je trouve une satisfaction infinie dans la certitude de ne les revoir jamais : la voix de l’amour éteignoit celle de l’amitié. Je goûte sans remords la douceur de les réunir. D’un autre côté, Déterville m’a assuré qu’il nous étoit à jamais impossible de revoir la ville du Soleil. Après le séjour de notre patrie, en est-il un plus agréable que celui de la France ? Il te plaira, mon cher Aza, quoique la sincerité en soit bannie ; on y trouve tant d’agrémens, qu’ils font oublier les dangers de la société.

Après ce que je t’ai dit de l’or, il n’est pas nécessaire de t’avertir d’en apporter, tu n’as que faire d’autre mérite ; la moindre partie de tes trésors suffit pour te faire admirer & confondre l’orgueil des magnifiques indigens de ce Royaume ; tes vertus & tes sentimens ne seront chéris que de moi.

Déterville m’a promis de te faire rendre mes nœuds & mes Lettres ; il m’a assurée que tu trouverois des Interprêtes pour t’expliquer les dernières. On vient me demander le paquet, il faut que je te quitte : adieu, cher espoir de ma vie ; je continuerai à t’écrire : si je ne puis te faire passer mes Lettres, je te les garderai.

Comment supporterois-je la longueur de ton voyage, si je me privois du seul moyen que j’ai de m’entretenir de ma joie, de mes transports, de mon bonheur !


Résumé et enjeux

Au début de la lettre, Zilia annonce à Aza qu’elle renonce à son projet de se rendre en Espagne pour le rejoindre : « Je sors de l’entrevue que Déterville m’avoit assignée ; quelque plaisir que je me sois fait de surmonter les difficultés du voyage, de te prévenir, de courir au-devant de tes pas, je le sacrifie sans regret au bonheur de te voir plutôt. » Elle explique que Déterville lui a démontré qu’il serait plus rapide pour Aza de venir en France que pour elle d’aller en Espagne. Cette révélation vient modifier son désir initial. Zilia avait envisagé de prendre la route, malgré la fatigue et les dangers, pour retrouver son fiancé avant qu’il ne s’éloigne davantage ; elle se réjouissait de l’idée de le surprendre. Mais l’argument du chevalier la convainc : elle décide d’attendre. L’héroïne avoue toutefois qu’une autre raison motive son choix. Lors de ses précédents voyages, elle avait remarqué que Déterville distribuait pièces d’or et d’argent à chaque étape. Elle découvre que, contrairement à la tradition inca, en France on fait payer non seulement la nourriture des voyageurs, mais même le repos. N’ayant pas d’argent, elle devrait emprunter à Déterville et se sentirait humiliée de contracter une dette. Cette obligation matérielle lui est insupportable : elle préfère rester pour préserver sa dignité. En même temps, elle se sent soulagée d’éviter les territoires espagnols qu’elle juge barbares. Elle souligne qu’elle aurait été horrifiée de croiser à nouveau les « barbares Espagnols » et qu’elle trouve une satisfaction profonde dans la certitude de ne plus les revoir. La lettre comporte aussi des éléments pratiques : le chevalier promet d’écrire au ministre d’Espagne pour presser le départ d’Aza et organiser son voyage. Zilia jouit de voir les préparatifs de ces retrouvailles, qu’elle considère comme les apprêts de son bonheur. Elle découvre également la nécessité de l’or dans la société française et l’impossibilité de revoir la ville du Soleil, son pays natal. Elle constate que la France, malgré l’absence de sincérité, offre tant d’agréments qu’on y oublie les dangers de la société.

À la fin de la lettre, Zilia demande à Aza de n’apporter qu’un minimum de trésors : le peuple français, avide d’apparence, n’a besoin que d’une petite partie de ses richesses pour être impressionné. Elle assure que seules ses vertus et ses sentiments seront aimés par elle. Enfin, elle confie que Déterville s’est engagé à restituer à Aza les quipos et les lettres qu’elle lui a confiés. Elle conclut en annonçant qu’elle continuera à écrire, même si ses lettres n’arrivent pas à destination, car l’écriture lui permet d’entretenir la flamme de son bonheur.

À travers cette narration, Graffigny joue avec les codes du récit de voyage. Elle renverse l’idée du périple héroïque : l’héroïne ne part pas, et son courage consiste à demeurer. Ce renversement est d’autant plus frappant qu’il intervient après plusieurs lettres où Zilia a manifesté son désir de précéder Aza pour lui annoncer elle-même sa survie. Le lecteur, habitué aux récits d’épopées et de retrouvailles, voit les attentes détournées ; l’autrice préfère la lenteur et la réflexion au geste impulsif. En cela, la lettre 26 anticipe la modernité du roman, qui se structure autour des émotions et non des actions spectaculaires. L’histoire d’amour devient un prétexte pour explorer l’âme d’une femme en quête de liberté et de vérité. La tension dramatique ne repose plus sur des péripéties, mais sur des choix moraux et des dilemmes intérieurs.

La lettre propose aussi une réflexion sur l’attente. En renonçant au voyage, Zilia choisit le temps long. Elle reconnaît que le temps est trop précieux pour être gaspillé. La gestion du temps est au cœur du roman : Zilia écrit pour tuer l’attente, et l’attente nourrit l’écriture. Les lettres sont datées de manière imprécise, mais l’on sait que des mois s’écoulent entre la capture et l’arrivée d’Aza. L’héroïne s’approprie ce temps en écrivant. La lettre 26 montre comment la patience peut être un acte de courage. Elle ouvre ainsi une méditation sur l’amour fidèle : attendre n’est pas se résigner, mais témoigner d’une confiance dans l’avenir. Ce thème sera déçu par la suite lorsque Aza arrivera changé. L’attente devient alors un sacrifice : Zilia aura attendu en vain. Cette dimension tragique se profile en filigrane dans la lettre.

L’enjeu central de cette lettre réside donc dans le rapport au voyage et à la liberté. Zilia quitte l’état d’attente passive pour affirmer un choix rationnel : rester en France n’est pas seulement une question de commodité, mais un acte de dignité. L’héroïne comprend qu’en acceptant l’aide financière de Déterville, elle risquerait de se soumettre à une nouvelle forme de domination. En demeurant en France, elle se libère d’un devoir pesant et affirme son autonomie. Cette décision marque également une avancée dans son integration ; elle commence à percevoir la France comme un lieu où elle peut vivre, même si elle en critique l’hypocrisie. Enfin, la lettre souligne la tension entre l’amour et l’amitié : Zilia pense à Aza, mais elle exprime aussi une profonde gratitude envers Déterville, dont la générosité ne se dément pas. Le triangle sentimental se dessine : d’un côté, l’amour fidèle pour le fiancé absent ; de l’autre, les attentions d’un chevalier qui s’efface tout en dévoilant ses sentiments. Cette tension se révélera dans les lettres suivantes.


Thématiques et symboles

La lettre 26 aborde plusieurs thèmes phares du roman : la découverte de l’argent, le rapport au don et à la dette, la critique de la société française, l’exil et le renoncement à la patrie, la tension entre amour et amitié, et l’émancipation féminine. Ces thématiques s’inscrivent dans une réflexion plus large sur la société des Lumières et sur la position des femmes.

L’argent et la dette : La découverte du caractère marchand de la société française constitue un choc pour Zilia. Dans la culture inca, l’hospitalité est sacrée ; les voyageurs sont reçus gratuitement dans les maisons d’Incas, comme le rappelle la note finale de la lettre. Cette pratique est confirmée par l’article sur les Lettres d’une Péruvienne : les Incas avaient établi sur les chemins des « grandes maisons où l’on recevoit les voyageurs sans aucuns frais ». L’héroïne constate avec étonnement que, dans la société française, on fait payer le repos, un concept qui lui est étranger. Ce constat lui donne un aperçu de l’économie monétaire et des relations marchandes, qui contrastent avec la gratuité du monde inca. La honte que Zilia éprouve à se faire payer par Déterville révèle l’importance de l’honneur et de l’indépendance dans sa culture. En refusant cette dette, elle affirme son intégrité et sa dignité. Le thème de l’argent renvoie aussi à la critique d’une société avide de richesses et attachée aux apparences. Zilia avertit Aza qu’il suffit d’apporter une partie de ses trésors pour impressionner les Français. Cette remarque souligne l’hypocrisie sociale ; l’argent sert à masquer la pauvreté morale et la superficialité des valeurs.

Dans un sens plus large, l’or symbolise l’illusion. Dans la ville du Soleil, les objets sacrés ont une valeur spirituelle. En France, les richesses incaïques deviennent des curiosités destinées à la consommation et à l’ostentation. Zilia se rend compte que ses trésors risquent de réduire Aza à un rôle de curiosité exotique. C’est pour cette raison qu’elle lui conseille de n’apporter qu’une petite quantité d’or. Le « magnifique indigent » devient un oxymore révélateur : la magnificence se réduit à l’apparence et à la dépense, tandis que l’indigence concerne la morale et la sincérité. Cette inversion des valeurs annonce les critiques sur la société de consommation, bien avant l’heure. Graffigny devine la place grandissante du commerce et du luxe dans la société européenne, et elle met en garde contre le danger de laisser l’argent définir la valeur des individus.

La critique de la société française : Zilia continue d’exercer son regard extérieur sur la société qui l’accueille. Elle reconnaît que la France possède de nombreux agréments, mais elle déplore l’absence de sincérité dans les relations humaines. Cette perception s’inscrit dans une thématique récurrente du roman. Zilia compare la langue française à des meubles plaqués d’or : l’ornement cache la superficialité des sentiments. L’apparence et la parole se dissocient, et l’héroïne regrette cette duplicité. Dans la lettre 26, la mention des « magnifiques indigents » de France atteste de son ironie : les Français se montrent luxueux mais restent pauvres en sincérité. Plus tard, dans d’autres lettres, elle critiquera l’hypocrisie sociale et l’éducation futile des femmes. Dans la lettre 26, la critique se manifeste par la valorisation du trésor et par la remarque selon laquelle les plaisirs français font oublier les dangers de la société.

La mention explicite de la difficulté de revoir la ville du Soleil renforce cette critique. En promettant à Zilia qu’elle ne reverra jamais sa patrie, Déterville lui impose une vérité brutale qui traduit l’éradication des cultures indigènes. L’invisibilisation de la ville du Soleil rappelle l’histoire réelle des Incas : leur civilisation fut détruite par la conquête espagnole. Le roman suggère que la France, en accueillant Zilia, participe à cette disparition en l’intégrant à ses propres rites et en lui faisant oublier sa culture d’origine. La critique ne vise donc pas seulement l’Espagne, mais aussi la complicité tacite de la société française dans l’effacement des peuples colonisés.

L’exil et le renoncement : Le renoncement à retourner à la ville du Soleil constitue un tournant psychologique pour Zilia. Déterville lui explique qu’il est « à jamais impossible de revoir la ville du Soleil ». Cette déclaration, d’une violence symbolique, marque la fin des espoirs de retour. Zilia se retrouve définitivement exilée. Le choix de rester en France prend une dimension plus grave : il s’agit d’un arrachement à la patrie. Pourtant, elle exprime une satisfaction « infinie » à l’idée de ne plus revoir les barbares Espagnols, ce qui témoigne d’une adaptation progressive. L’exil est associé à la quête de liberté ; Zilia comprend que sa patrie ne pourra plus lui offrir les conditions d’une existence épanouie. Ce thème est central dans l’œuvre, qui met en scène des personnages déracinés. Il résonne également avec la propre expérience de l’autrice : en écrivant, Graffigny se construit un espace de liberté où elle peut critiquer son époque.

Ce renoncement se double d’une méditation sur la perte. Dans la cosmologie inca, la ville du Soleil est le centre symbolique du monde ; renoncer à y retourner revient à renoncer à un équilibre cosmique. Zilia exprime son horreur pour les Espagnols, mais son exil la prive aussi des rites et des coutumes qui l’ont façonnée. La lettre 26 entérine cette perte. Le lecteur ressent la douleur de l’exil à travers les choix lexicaux : « à jamais », « impossible », « barbares ». Graffigny sensibilise ainsi son public à la violence de la conquête coloniale. La décision de rester en France apparaît paradoxalement comme un acte de survie : revenir parmi les Espagnols serait plus traumatisant que d’abandonner son pays. Cette ambivalence reflète la complexité de l’exil moderne, où le renoncement est à la fois une déchirure et un espoir.

Amour et amitié : Zilia affirme son amour pour Aza tout en soulignant l’amitié qu’elle éprouve pour Déterville. Elle rend hommage à son générosité et à son dévouement. Le chevalier agit comme un intermédiaire entre l’ancienne vie de Zilia et son avenir. Par sa bienveillance, il met en valeur la possibilité d’une relation fondée sur la vertu et le respect, contrastant avec les prétendants frivoles que l’héroïne rencontrera plus tard. L’ambiguïté de ses sentiments se révélera au fil du roman. Dans la lettre 26, elle insiste néanmoins sur la loyauté envers Aza et sur la joie que lui procurent les préparatifs de son voyage. L’écriture de quipos et la correspondance demeurent le lien privilégié entre les amoureux. L’héroïne confie qu’elle continuera à écrire même si ses lettres ne parviennent pas à destination, car l’écriture lui permet de se remémorer ses émotions : c’est le seul moyen pour elle de « s’entretenir de sa joie, de ses transports, de son bonheur ».

Cette distinction entre amour et amitié est essentielle à la compréhension du roman. Graffigny refuse de faire de son héroïne une amante passionnée aveugle aux qualités des autres hommes. Zilia reste fidèle à Aza, mais elle n’est pas indifférente à la bonté de Déterville. Elle perçoit la noblesse de son âme et la pureté de ses intentions. Cette sensibilité s’inscrit dans la tradition du roman sentimental ; l’œuvre explore la palette des sentiments humains et interroge l’équilibre entre l’affection et la morale. La lettre 26, en célébrant l’amitié désintéressée, propose une alternative aux récits d’amour exclusif. Elle montre qu’une femme peut cultiver plusieurs liens affectifs sans renier sa loyauté. Cette nuance sera essentielle pour comprendre la décision finale de Zilia, qui choisira d’embrasser la solitude plutôt que de se soumettre à un mariage qui compromettrait sa liberté.

Émancipation féminine : Graffigny se sert de l’histoire de Zilia pour promouvoir l’indépendance des femmes. L’héroïne prend des décisions en fonction de ses valeurs, refuse l’endettement et se montre capable de juger ce qui est bon pour elle. Cette autonomie est à replacer dans un contexte où les femmes sont perçues comme des êtres faibles, soumis à l’autorité masculine. Le roman dénonce la superficialité de l’éducation féminine et l’absence de libertés, comme le souligne une fiche de lecture contemporaine : Zilia remarque que les femmes françaises ont très peu de liberté et qu’elles ne peuvent choisir leur propre vie. L’héroïne aspire à exister comme femme libre. Dans la lettre 26, sa décision d’attendre Aza plutôt que de dépendre de Déterville constitue un geste d’émancipation. Elle refuse une dette qui la lierait à un homme autre que son fiancé et affirme son pouvoir de décision.

Cette thématique s’illustre aussi par la place accordée à l’écriture. Les quipos sont les instruments d’une parole féminine, clandestine et codée, qui échappe au contrôle des hommes. En France, Zilia apprend à écrire en français et conquiert un droit à la parole. Graffigny, elle-même femme de lettres, met en scène cette conquête. La lettre 26 montre à quel point l’écriture est un espace de liberté : écrire permet à Zilia de parler de sujets qui lui seraient interdits à l’oral et de conserver l’intégrité de sa pensée. La correspondance devient un lieu d’expérimentation et de réflexion où se construit l’identité de la narratrice. Ce rôle émancipateur de l’écriture préfigure l’importance que les femmes donneront à la littérature pour contester les normes sociales dans les siècles suivants.


Analyse linéaire de la lettre

Pour approfondir la compréhension de cette lettre, il est instructif de suivre la progression du texte. Graffigny structure sa lettre en trois mouvements. D’abord, Zilia annonce son renoncement au voyage et justifie son choix en mettant en avant l’efficacité de l’option proposée par Déterville. Ensuite, elle dévoile la véritable motivation de sa décision : la honte d’accepter l’argent de son protecteur et la répugnance à contracter une obligation. Enfin, elle contemple les conséquences de ce choix, évoquant ses sentiments, les implications symboliques et les actions qu’elle entreprend.

Annonce du renoncement et argument rationnel : Dès l’incipit, Zilia crée un lien entre le lieu d’écriture et l’émotion : « C’est ici, mon cher Aza, que je te reverrai ; mon bonheur s’accroît chaque jour par ses propres circonstances. » L’adverbe « ici » désigne la France comme lieu de rendez-vous. La narratrice évoque son « bonheur » qui s’accroît, soulignant son anticipation. Elle enchaîne avec la description de l’entretien avec Déterville : « Je sors de l’entrevue que Déterville m’avoit assignée ; quelque plaisir que je me sois fait de surmonter les difficultés du voyage, de te prévenir, de courir au-devant de tes pas, je le sacrifie sans regret au bonheur de te voir plutôt. » Le recours au subjonctif et aux verbes d’effort (« surmonter », « prévenir », « courir ») témoigne du désir initial de Zilia, tandis que le verbe « sacrifier » marque la décision. Elle oppose l’aventure du voyage à l’impatience de la rencontre. Elle poursuit : « Déterville m’a prouvé avec tant d’évidence que tu peux être ici en moins de tems qu’il ne m’en faudroit pour aller en Espagne, que quoiqu’il m’ait généreusement laissé le choix, je n’ai pas balancé à t’attendre, le tems est trop cher pour le prodiguer sans nécessité. » La syntaxe associe le raisonnement scientifique (« prouvé avec tant d’évidence ») et l’empressement sentimental. Le choix du mot « tems » (orthographe du xviiie siècle) renforce l’impression de rareté. Zilia souligne la générosité de Déterville qui lui laisse le choix, ce qui valorise l’amitié, et affirme sa décision (« je n’ai pas balancé »), ce qui atteste de sa détermination.

L’analyse stylistique de ce passage révèle la maîtrise de l’autrice. Elle associe des propositions coordonnées par des conjonctions de cause et de concession (« quoique », « que ») pour montrer comment la raison et le sentiment cohabitent. La construction « quelque plaisir que je me sois fait » exprime une concession qui renforce la valeur du sacrifice. Le rythme périodique de la phrase traduit l’hésitation avant la décision. Les répétitions (« bonheur », « plaisir ») soulignent l’importance des émotions. L’usage du futur (« je te reverrai ») confère au discours un caractère prophétique : Zilia se projette dans l’avenir.

Révélation de la motivation secrète : Après avoir exposé le motif rationnel, Zilia introduit un secret : « Peut-être avant de me déterminer, aurois-je examiné cet avantage avec plus de soin, si je n’eusse tiré des éclaircissemens sur mon voyage qui m’ont décidée en secret, sur le parti que je prends ; & ce secret je ne puis le confier qu’à toi. » L’emploi du conditionnel et du passé du subjonctif laisse entendre que la décision aurait pu être différente si elle n’avait pas découvert un élément décisif. L’emploi de « secret » suscite la curiosité du lecteur et souligne la relation de confiance avec Aza. Elle révèle avoir observé que Déterville distribuait des pièces d’argent et d’or à chaque étape de leur voyage ; elle voulait savoir si c’était une obligation ou un geste de générosité. Elle apprend alors « qu’en France, non-seulement on fait payer la nourriture aux voyageurs, mais même le repos ». Ce constat est rapporté de manière simple, mais il a une portée symbolique : il illustre l’entrée de Zilia dans une économie marchande et met en relief la différence culturelle. Le mot « repos » renvoie à un besoin vital qui, selon elle, ne devrait pas être tarifé. La phrase suivante traduit son angoisse : « Hélas ! je n’ai pas la moindre partie de ce qui seroit nécessaire pour contenter l’intérêt de ce peuple avide ; il faudroit le recevoir des mains de Déterville. Quelle honte ! tu sçais tout ce que je lui dois. » Les exclamations expriment l’indignation et la détresse. Le terme « peuple avide » accentue la critique sociale. Elle rappelle qu’elle doit déjà beaucoup à son protecteur et qu’elle accepterait une nouvelle aide avec « répugnance », un sentiment qui ne peut être vaincu « que par la nécessité ». Mais contracter volontairement une obligation lui est impossible ; elle refuse de s’abaisser au point de sentir « l’ignominie ». Ce passage manifeste la fierté de Zilia et sa conception de l’honneur.

Ce segment de la lettre est construit sur le registre de la confession. Zilia se met à nu et dévoile un sentiment de honte. L’expressivité est renforcée par l’interjection « Hélas ! », par la ponctuation abondante et par l’hyperbole (« pas la moindre partie »). La syntaxe est hachée, marquée par des pauses (« Quelle honte ! tu sçais »), ce qui traduit l’émotion. La progression du discours suit un cheminement logique : constat de la nécessité du paiement, conscience de l’absence d’argent, identification de la source du financement (Déterville), rejet de cette solution. Cette transparence reflète la probité morale de l’héroïne et son refus de toute compromission.

Conséquences et acceptation du choix : Après avoir expliqué ses motivations, Zilia se tourne vers l’avenir. Elle exprime sa reconnaissance envers Déterville : il a écrit au ministre d’Espagne pour presser le départ d’Aza. Elle décrit avec émotion les moments où le chevalier rédige la lettre : « Quels doux momens j’ai passé, pendant que Déterville écrivoit ! Quel plaisir d’être occupée des arrangemens de ton voyage, de voir les aprêts de mon bonheur, de n’en plus douter ! » La répétition du pronom « quel » souligne l’intensité de ses sentiments. Elle se réjouit de la certitude d’une réunion prochaine. La narratrice avoue ensuite qu’abandonner l’idée de prévenir Aza a été douloureux, mais qu’elle y trouve maintenant de nouvelles sources de plaisir. La satisfaction provient de circonstances inattendues : elle se souvient qu’elle allait affronter les « barbares Espagnols », et l’idée de ne plus les voir lui offre une joie immense. Elle constate que la voix de l’amour éteignait celle de l’amitié, mais qu’elle peut désormais concilier les deux. Elle mentionne également l’information décisive : Déterville lui a assuré qu’il serait à jamais impossible de revoir la ville du Soleil. Cette affirmation étouffe tout désir de retour et consacre la rupture définitive. Zilia cherche à consoler Aza ; elle affirme que la France est le lieu le plus agréable après leur patrie, bien qu’elle y constate le bannissement de la sincérité. Elle remarque que la nation française regorge d’agréments qui font oublier les « dangers de la société ». Ce paradoxe illustre son ambivalence : elle admire la culture française tout en en dénonçant les vices.

Dans cette partie, la syntaxe s’ouvre et se détend. Les phrases deviennent plus longues, les images plus sensuelles. Zilia évoque des « doux moments », des « après » et des « aprêts ». La répétition de « quel plaisir », « quel doux moment » instaure un rythme chantant qui traduit la volupté anticipée. La parole se fait aussi plus philosophique : Zilia réfléchit à la valeur du temps et à l’équilibre entre l’amour et l’amitié. Elle reconnaît que la passion aveugle (« la voix de l’amour éteignoit celle de l’amitié ») l’avait jusqu’alors dominée. Désormais, elle veut réunir ces voix. Cette déclaration annonce l’évolution future de son personnage, qui finira par choisir l’amitié vertueuse plutôt que l’amour infidèle. Ce mouvement de la lettre montre ainsi comment Graffigny prépare le lecteur à accepter le dénouement inattendu du roman.

Elle aborde ensuite l’importance de l’or : ayant compris que l’argent gouverne les interactions sociales, elle conseille à Aza de n’apporter qu’une partie de ses trésors, car même une faible quantité suffira à susciter l’admiration des Français. Le terme « magnifiques indigents » qu’elle utilise pour qualifier les Français évoque à la fois leur goût pour le luxe et leur indigence morale. Elle ajoute : « tes vertus & tes sentimens ne seront chéris que de moi », signifiant que les Français s’intéresseront à son or, tandis qu’elle valorisera son caractère. Enfin, Zilia explique que Déterville a promis de restituer les quipos et les lettres à Aza. L’arrivée de personnes pour prendre le paquet la contraint à terminer sa missive : elle adresse un adieu poignant à Aza, l’appelle « cher espoir de ma vie » et promet de continuer à écrire, même si les lettres ne sont pas transmises. Elle conclut en soulignant que l’écriture est le seul moyen pour elle de supporter l’attente et d’exprimer sa joie. Ce dernier passage démontre la fonction cathartique de l’épistolaire ; la lettre permet à Zilia de transformer son impatience en narration et de préserver sa relation avec Aza.


Résonances avec le reste du roman

La lettre 26, isolée, peut être lue comme une scène de transition. Toutefois, replacée dans la logique du roman, elle ouvre plusieurs pistes d’interprétation. Elle fait notamment écho à la critique de l’éducation et de la condition féminine, au thème de l’illusion sociale et au rapport au voyage.

On peut également la mettre en regard des réflexions sur le langage et la vérité développées dans les lettres ultérieures. Zilia, qui doit apprendre le français pour communiquer, découvre les subtilités d’une langue qui dissimule autant qu’elle dévoile. Un article consacré à l’enjeu du langage rappelle que la société française pratique un « langage d’action » opposé au langage verbal ; les gestes et les attitudes transmettent une vérité que les mots masquent. Dans la lettre 26, cette duplicité se manifeste lorsqu’il est question de l’or et du repos payant. Le paiement devient un geste qui signifie la dépendance et la hiérarchie sociale. Zilia, observatrice perspicace, comprend que les apparences peuvent être trompeuses, et elle s’adapte en conséquence. Par la suite, elle fera un usage critique du français, dénonçant la futilité des conversations mondaines et revendiquant l’adéquation entre la parole et l’action.

La lettre 26 résonne également avec le thème de la raison, valeur centrale des Lumières. Zilia est guidée par la raison lorsqu’elle décide de rester en France. Elle met en pratique un idéal philosophique : peser les arguments, considérer le rapport coût-bénéfice et choisir la solution la plus rationnelle. La lettre illustre la tension entre la raison et la sensibilité. L’héroïne éprouve des sentiments puissants, mais elle ne se laisse pas gouverner par eux. Son choix montre qu’elle prend au sérieux la notion de devoir. Cette attitude est caractéristique de l’esprit des Lumières, qui prône l’usage de la raison pour atteindre la vertu. Plus tard, elle remettra en question l’hypocrisie de ceux qui se réclament de cette raison sans en appliquer les principes. La lettre 26 anticipe cette critique.

Critique de l’éducation et de la condition féminine : L’attitude de Zilia face à l’argent et à la dette reflète une éducation axée sur l’honneur et la vertu. Son parcours la conduit à apprendre la langue française et à maîtriser les codes de la société, mais elle ne renonce jamais à ses valeurs. Dans des lettres ultérieures, elle dénonce la superficialité de l’éducation des femmes dans les couvents, qui les forme à être des objets d’ornement plutôt qu’à acquérir un savoir profond. En restant en France, Zilia entreprend un apprentissage qui la conduira à surpasser ses contemporains. Son refus de dépendre financièrement d’un homme anticipe la revendication moderne d’indépendance. Les critiques féministes ont souligné que le roman de Graffigny proposait une figure de résistance féminine ; la lettre 26 en est un exemple.

Illusion sociale et langage : L’épisode du paiement du repos révèle la prédominance de l’illusion sociale. Zilia découvre que les services les plus simples sont monétisés, ce qui l’indigne. Cette scène s’inscrit dans la réflexion sur le langage et les rites sociaux. Graffigny compare le langage français aux meubles plaqués en or : une apparence polie cache une réalité trompeuse. De même, la transaction monétaire dissimule une dépendance sociale. Zilia se méfie de ces codes, mais elle finit par les utiliser pour protéger son autonomie : en demandant à Aza d’apporter de l’or, elle anticipe les attentes de la société. Cette lucidité renforce sa crédibilité comme observatrice.

Rapport au voyage et à l’étranger : Le choix d’attendre Aza remet en question la figure traditionnelle de la femme voyageuse. Au début du roman, Zilia est transportée contre son gré vers l’Europe. Elle subit l’expérience du bateau comme une « maison suspendue en balancement » et découvre la France avec surprise. Dans les lettres précédentes, son regard naïf sur Marseille et sur les coutumes françaises sert de satire sociale. Dans la lettre 10, par exemple, elle s’émerveille de la ville tout en dénonçant l’affectation des Français ; son étonnement fait ressortir leur superficialité. Dans la lettre 26, Zilia prend le contrôle de son voyage : elle décide de ne pas partir, revendiquant son libre arbitre. Ce refus de déplacement transforme l’exil forcé en séjour choisi. L’héroïne s’approprie l’espace français et devient actrice de son destin.

Préfiguration du dénouement : La lettre 26 annonce la rupture finale entre Zilia et Aza. En conseillant à son fiancé de ne pas apporter de richesses autres que l’or nécessaire, elle anticipe la futilité des valeurs françaises. Lorsqu’Aza arrivera en France, il se sera converti au catholicisme et s’apprêtera à épouser une jeune Espagnole, trahissant ainsi l’amour de Zilia. Celle‑ci découvre alors que l’amour peut se dissocier du devoir, et elle choisit l’amitié sincère de Déterville. La lettre 26 prépare cet aboutissement : elle montre déjà l’attachement de l’héroïne à son protecteur et sa méfiance à l’égard de la société de son fiancé. Elle marque le passage de la dépendance amoureuse à l’autonomie morale.

En outre, la lettre 26 fait écho à l’écriture de la fin du roman, qui comprend deux lettres supplémentaires ajoutées en 1752. Dans ces lettres, Zilia écrit directement à Déterville, s’adressant à lui avec une confiance accrue et exprimant sa décision de vivre en France sans se remarier. La progression de la correspondance révèle le chemin parcouru depuis la lettre 26 : la jeune femme, d’abord exilée et dépendante, devient une figure indépendante capable de rejeter l’amour déçu et de choisir sa destinée. Cette évolution trouve son origine dans la décision mature qu’elle prend dans la lettre 26.


Conclusion

La lettre 26 des Lettres d’une Péruvienne représente un tournant décisif dans l’itinéraire de Zilia. À travers la décision de ne pas partir en Espagne, Graffigny révèle la maturité de son héroïne, qui s’appuie sur la raison pour guider ses actes. Ce choix résulte d’une prise de conscience économique et morale : Zilia refuse de contracter une dette envers Déterville et comprend que l’argent régit les relations sociales en France. Cette découverte, qui contraste avec la gratuité de l’hospitalité inca, sert d’outil critique contre la cupidité française et la superficialité des valeurs. En même temps, la lettre célèbre l’amitié et la générosité du chevalier, tout en laissant transparaître la persistance d’un amour fidèle pour Aza. Elle offre un moment de bonheur où les préparatifs de la rencontre sont savourés comme une promesse de bonheur. Sur le plan symbolique, le renoncement à retourner à la ville du Soleil marque l’acceptation de l’exil. La patrie perdue devient un souvenir, tandis que la France se présente comme un espace ambigu : à la fois terre d’accueil pleine d’agréments et société hypocrite dépourvue de sincérité. Cette ambivalence imprègne tout le roman. Enfin, la lettre consacre l’écriture comme moyen de survie. L’épistolaire n’est pas seulement un dispositif narratif : il est, pour Zilia, un acte de résistance, un outil d’autoanalyse et une source de consolation. En continuant d’écrire à Aza, même sans réponse, elle maintient vivante sa propre histoire.

La richesse de cette lettre s’explique par la pluralité des thèmes abordés et par la finesse psychologique avec laquelle Graffigny les traite. L’auteure propose une réflexion sur la liberté, la dignité et la connaissance de soi. En donnant la parole à une femme étrangère, elle dénonce la violence coloniale, l’avidité économique et l’injustice sociale. Elle fait résonner la voix d’une héroïne qui, malgré l’exil et la souffrance, réussit à prendre en main son destin. La lettre 26, par sa structure et sa progression, illustre parfaitement l’art épistolaire : elle mêle récit, confession et réflexion philosophique, et elle annonce des rebondissements futurs. En somme, elle constitue un microcosme des « Lettres d’une Péruvienne », où l’intime se conjugue au politique pour offrir une critique acerbe et émouvante de la société française du xviiie siècle.

La portée de cette lettre ne s’arrête pas au cadre du roman. Elle a inspiré des lectures critiques et des reprises littéraires. Au XIXᵉ siècle, Balzac, dans « Mémoires de deux jeunes mariées », reprendra le motif de la lettre à l’absent et du renoncement au voyage pour exprimer la complexité de la condition féminine. Au XXᵉ siècle, des écrivaines francophones comme Leïla Sebbar verront dans Zilia une ancêtre de leurs héroïnes exilées, prises entre deux cultures et cherchant leur place. La littérature contemporaine continue de s’inspirer de ce modèle pour dénoncer la persistance des inégalités. La lettre 26 montre que l’analyse des relations économiques, des structures de pouvoir et des choix personnels est indissociable de la compréhension des identités. Le texte de Graffigny rappelle que les questions d’argent, d’exil et de liberté sont intimement liées, et que les femmes peuvent trouver dans l’écriture un moyen d’émancipation.

En conclusion, la lettre 26 est bien plus qu’une simple étape dans le récit : elle ouvre un espace de réflexion sur des thèmes universels qui résonnent aujourd’hui encore. En montrant une héroïne capable de refuser une dette, de maîtriser son temps, de choisir l’exil plutôt que la servitude, Graffigny propose un modèle d’émancipation qui dépasse les frontières du XVIIIᵉ siècle. Cette lettre témoigne de la puissance de la littérature pour interroger les normes sociales, pour dévoiler les injustices et pour donner une voix à celles qui en sont privées. Elle nous rappelle que le voyage le plus important n’est pas toujours celui qui mène d’un pays à l’autre, mais celui qui conduit à la connaissance de soi et à l’affirmation de sa liberté.

La richesse de cette lettre s’explique par la pluralité des thèmes abordés et par la finesse psychologique avec laquelle Graffigny les traite. L’auteure propose une réflexion sur la liberté, la dignité et la connaissance de soi. En donnant la parole à une femme étrangère, elle dénonce la violence coloniale, l’avidité économique et l’injustice sociale. Elle fait résonner la voix d’une héroïne qui, malgré l’exil et la souffrance, réussit à prendre en main son destin. La lettre 26, par sa structure et sa progression, illustre parfaitement l’art épistolaire : elle mêle récit, confession et réflexion philosophique, et elle annonce des rebondissements futurs. En somme, elle constitue un microcosme des « Lettres d’une Péruvienne », où l’intime se conjugue au politique pour offrir une critique acerbe et émouvante de la société française du XVIIIème siècle.


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