Il existe une Russie artistique mondialement reconnue. Celle qui fait que vous connaissez sans doute Tchaïkovski ou Rachmaninov comme des compositeurs ayant marqué l’histoire de la musique. Il en va de même pour les Dostoïevski et Tolstoï en littérature. Et puis il y a une Russie artistique plus confidentielle qui reste dans le cercle restreint d’experts de telle ou telle discipline. Prenez le cinéma, par exemple, un cinéphile sait que Tarkovski a marqué de son empreinte le septième art alors qu’un spectateur lambda se demandera qui est cet illustre inconnu.


La peinture, elle aussi, a du mal à se frayer un chemin à l’international si ce n’est pour l’œil averti de passionnés du pinceau. Certains tableaux valent pourtant le détour. Ils permettent de comprendre un peu plus ce qu’est la fameuse âme russe. Je vous propose ici une sélection de dix tableaux de peintres différents qui ont un rapport étroit avec le territoire russe. Certes, certains sont ukrainiens ou ont vécu une majorité de leur vie à l’étranger, mais tous relèvent de ce qu’on appelle communément la peinture russe.

Petit détail technique, pour voir les peintures en grand format, il vous suffit de cliquer sur la peinture correspondante.

1) Catherine | Dmitry Levitski

1780, Huile sur toile, 110 x 76,8 cm, Galerie Tretiakov, Moscou

Levitski était connu pour tirer le portrait à d’importantes personnalités de l’époque dont un certain Denis Diderot. Ce genre de commande était un des seuls moyens de survivre tout en vivant de son art. Devrais-je d’ailleurs dire survivre puisque la réalisation de ces portraits n’a pas évité à l’artiste de mourir dans la pauvreté du côté de Saint-Pétersbourg.

2) La neuvième vague | Ivan Aïvazovski

1850, Huile sur toile, 221 x 332 cm, Musée Russe de Saint-Pétersbourg

Ce tableau est sans doute l’un des plus connu de l’artiste puisqu’il représente ce que Aïvasovski aimait peindre par dessus tout: la mer. On peut y voir une vaste étendue d’eau agitée et c’est en s’approchant du tableau qu’il est possible de voir les multiples nuances, la sensibilité de la lumière ou encore l’utilisation de couleurs intenses pour la mer et le ciel.

3) Les bateliers de la Volga | Ilia Répine

1873, Huile sur toile, 131,5 x 281 cm, Musée Russe de Saint-Pétersbourg

Des hommes tirent un bateau de toutes leurs forces. Comme pour d’autres peintures, Ilia Répine met l’accent sur l’individualité des sujets. On peut voir, distinctement, les expressions de chaque visage et la douleur qui en ressort. Et c’est justement ce que cette peinture symbolise : la capacité du peuple russe à endurer la souffrance. Le peintre était sans doute l’un des maîtres incontestés du réalisme social.

4) La chênaie | Ivan Shishkin

1887, Huile sur toile, 125 x 193, Musée national de peinture de Kiev

Cette peinture ressemble à s’y méprendre à une photographie et représente bien le style naturaliste de Shishkin. Comme des dizaines d’autres, ce peintre fit partie d’un mouvement artistique russe appelé Les ambulants. Ils avaient pour but de rompre avec les codes académiques et d’organiser des expositions itinérantes afin de rendre l’art accessible à un large public.

5. Petit bois de bouleaux | Arkhip Kouïndji

1879, Huile sur toile, 97 x 181, Galerie Tretiakov, Moscou

Un bosquet qui surprend par l’utilisation d’effets de lumières et qui fit la renommée du peintre ukrainien. On dit d’ailleurs que certains visiteurs d’expositions où se trouvaient les œuvres du Kouïndji regardaient derrière le mur afin de voir si il n’y avait un pas un trucage ou une source de lumière supplémentaire.

6) Débarcadère pour bateaux à vapeur en Crimée | Constantin Korovine

1913, Huile sur toile, 67,5 x 84,5 cm, Galerie Tretiakov, Moscou

L’impressionnisme ne fut pas en reste sous les traits de pinceaux de Korovine. Quoi de plus normal pour ce peintre qui voyagea plusieurs fois à Paris avant de s’y installer définitivement. Il peignit la vie parisienne mais aussi des tableaux qui se déroulaient en Crimée tel ce port.

7) Le bolchevik | Boris Koustodiev

1920, Huile sur toile, 101 x 141 cm, Galerie Tretiakov, Moscou

Koustodiev peignit des sujets très différents les uns des autres, du portrait aux illustrations de classiques littéraires russes, en passant par des scènes de vie aux nus artistiques mais aussi des paysages, le peintre touche à tout. Cette peinture est une œuvre encore plus inhabituelle chez Koustodiev puisqu’il détourne une caricature de squelette géant en le remplaçant par un bolchevik. Cette composition deviendra vite un classique de l’art soviétique.

8) Nikita | Alexei Von Jawlensky

1910, Huile sur carton, 85,5 x 73,5 cm, Musée de Wiesbaden

En réalisant ce portrait du neveu de sa femme, le peintre donne une nouvelle dimension aux portraits. L’alternance des couleurs claires et sombres et l’apparente simplicité du style rend le composition d’une étonnante clarté. Ce désir de simplicité préfigure déjà un style plus abstrait.

9) Carré noir sur fond blanc | Casimir Malevitch

1915, Huile sur toile, 79,5 x 79,5 cm, Galerie Tretiakov, Moscou

Cette œuvre est typique du courant suprématisme fondé par Malevitch et qui poussait la peinture jusqu’à son abstraction quasi-complète. Cette manière de peindre est à comprendre dans la période où elle fut à son apogée (révolution russe, première et deuxième guerre mondiale) et peut être vue comme une provocation contre le bon goût, les normes sociales et les conventions artistiques.

10) Petits mondes | Vassily Kandinsky

1922, Lithographie, 105 x 98 cm, Centre Georges Pompidou (Paris)

Enfin, qui ne connaît pas Kandinsky? Ce peintre abstrait qui, comme Malevitch, rejetait tout élément figuratif dans ses peintures tout en gardant une certaine recherche d’expressivité. Il est à noter que ses œuvres les plus abstraites furent interdites en Russie car jugées nocives pour les idéaux socialistes.


Il existe encore bien d’autres peintres russes qui mériteraient un mot d’explication tels que Vrubel, Levitan ou Serov (pour ne citer qu’eux) mais le fait de limiter le choix à dix peintures permet, je l’espère, une meilleure lisibilité de l’évolution de la peinture russe. Chacun de ses peintres ayant apporté une touche personnelle à l’histoire de cet art en Russie.

До скорого !


Pour aller plus loin


7 réponses à « La peinture russe en 10 tableaux »

    1. Merci Laurence !

      J’aurais bien ajouté encore une dizaine d’autres tableaux afin d’avoir une vue vraiment complète sur la peinture russe. Cela sera sans doute pour un prochain article.

      Tout comme le mouvement des « ambulants » qui mériterait à lui-seul un article !

      À bientôt l’artiste!

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  1. Sauvé! J’avais les deux derniers en magasin. Par contre, les noms précédents ne me disaient absolument rien, si ce n’est leurs toiles tout de même, : le Bolchevik et les bateliers de la Volga.
    Très belle idée que ce top ten qui fait honneur à tout un pan de l’art qui mérite d’être découvert.

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    1. Merci cher cinéphile 😉

      La peinture russe est passé par tous les courants et en a même créés mais la barrière de la langue et notre relative ignorance sur ce pays fait que la plupart des peintres très connus en Russie restent assez confidentiels en Europe de l’Ouest :))

      Un peu à l’instar d’un Tarkovski pour le cinéma, trop peu connu si ce n’est dans le cercle des cinéphiles alors qu’il a fait un réel travail de recherche cinématographique.

      Au plaisir de continuer à lire tes articles!

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  2. Très intéressant. Merci !

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  3. Belle découverte, merci.
    La vague est impressionnante de réalisme ! Ainsi que la chênaie. J’aime beaucoup aussi les œuvres du vingtième siècle, avec Kandinsky, bien sûr. 😉
    Bon week-end ! 🔆

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    1. Merci chère Lune pour ton passage ! Aïvazovski est un de mes peintres préférés. Je trouve que l’on a rarement peint la mer en apportant un jeu de lumière surnaturel et réaliste en même temps.

      À bientôt !

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